
458. Dénuement à tenter d’avancer dans Algérie, chaque ligne est nouvelle et ne s’appuie sur rien d’autre qu’elle-même, me semble-t-il. Comme un vertige d’impuissance. Je me nourris de Conrad, Au cœur des ténèbres (1899), lu il y a si longtemps que je redécouvre ce formidable texte. Longtemps le film Apocalypse now de Coppola a fait écran. Retour à l’origine donc, c’est de circonstance. Toute œuvre se mesure aussi à l’aune des crises contemporaines, individuelles ou collectives. Le voyage de Charlie Marlowe, cette remontée d’un fleuve africain pour retrouver un certain Kurtz, s’apparente à l’exploration « d’une planète inconnue », « errants sur la terre préhistorique », tandis qu’ils pénètrent « de plus en plus profondément au cœur des ténèbres », « les profondes ténèbres au cœur des choses », où le mal est tapi. Or nous y sommes à nouveau. Le dictateur russe me fait l’effet d’un « homme creux », « sans entrailles », de ceux que, pense Marlow, rien n’atteint.
459. « Une souillure de rapacité imbécile soufflait à travers le tout, comme un relent de quelque cadavre ». (Conrad)