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370. Tout est à voir, question rhétorique en un sens. J’ai maintenant un portulan pour naviguer. Des îlots sont bien là ; en surgissent d’autres, nés d’une sourde activité souterraine qui m’échappe en grande partie. Ainsi, bien que je n’aie aucune photo de nuit, m’est venue l’idée du ciel étoilé nocturne dans le désert. Quelle nuit faisait-il le 1er octobre 61 à Aïn Sefra ?
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371. Sylvain M. me laisse hier un message : un enregistrement vocal de message téléphonique que je lui avais laissé vers 1994 ? Je ne reconnais pas ma voix, ce n’est qu’à la mention d’un prénom féminin que je me remets dans ce message. Je suis troublé par ce double spectral, comme par la voix et l’image de La Stilla qui soudain apparaissent dans le château hanté de Rodolphe de Gortz, dans le Château des Carpathes. Point de hantise mais de la technique… Ou plutôt point topologique de hantise qui fait retour par le biais de la technique, et de la pulsion d’archive d’un ami. J’aurais aimé pouvoir retrouver ces spectres pour le projet A. L’inventeur maudit de Jules Verne, Orfanik, vient du roumain orfan, orphelin. Par un repli sur lui-même comme le temps en a l’habitude, la lecture d’enfance vient se superposer à ce très vieux message téléphonique oublié et soudain réapparu, en une conjuration du temps qui passe (maintenant je suis orfan) et qui ne passe pas, puisque les deux points n’en font plus qu’un. S. accompagne son message de la photo de mon mémoire de maîtrise, Effondrement-Effondement, à côté du volume Quarto de la Recherche : tout était déjà là. Ce double mouvement.
372. Il s’agit donc, grâce à l’écriture d’A., de faire se superposer les points, comme en une courbure de l’espace-temps. Algérie devient donc un nouvel objet constitué de feuillets où les points se superposent pour ne faire qu’un, des « archipels », comme je les appelle. Pierre d’attente encore, finir Métaphysique quantique d’Ortoli et Pharabod pour affiner cette histoire de courbure de l’espace-temps.
373. Les trois poinçons précédents sont intimement liés.
374. Je vérifie l’étymologie du mot archipel : du grec arkhein, « commander », et gr. biz. *α ̓ ρ χ ι π ε ́ λ α γ ο ς « mer principale », croisement de Α ι ̓ γ α ι ̃ ο ν π ε ́ λ α γ ο ς « mer Égée » avec α ̓ ρ χ ι- (archi-*), bref, « Mer Égée des Anciens, parsemée d’un grand nombre d’îles », et « P. ext., cour. Ensemble d’îles disposées en groupe ». Et P. anal. [Avec gén. un compl. de nom prép. de] Groupement irrégulier de choses (concrètes ou abstraites) identiques ou semblables. Merci au CNRTL, inépuisable et incollable.
