28 nov 21

Photo : B.L.

290. Je n’avais pas mesuré l’inertie du livre en train de s’écrire, son erre en moi (comment aurais-je pu, d’ailleurs, puisque ce savoir ne se révèle que dans l’action). Je la mesure, comme un paradoxe, à mon impossibilité d’écrire certains jours. Pour reprendre le poinçon 271, je suis à ce moment-là empêché. Revoir les anciennes diapos m’a donc durement empêché (divers symptômes). La dynamique est celle de l’à-coup et de l’après-coup. Etymologie de « coup » :

881 colp « mouvement par lequel un corps vient heurter un autre corps » (Eulalie, 20 ds Henry Chrestomathie, p. 3) (CNRTL)

C’est ce corps photographié, là devant, projeté au mur.

Les à-coups, la saccade : un régime moteur induit par des empêchements ; des secousses violentes. J’écris souvent (toujours ?) par à-coups. N’écrit-on d’ailleurs jamais que par à-coups ? Un autre régime est-il possible ? A creuser : de quelle temporalité parle-t-on ?

L’après-coup : continent énorme de la psychanalyse. Cf. Bernard Chervet (“L’aprèscoup : La tentative d’inscrire ce qui tend à disparaître”,  Revue française de psychanalyse 2009/5 (Vol. 73), pages 1361 à 1441).

Le contrecoup : tenter d’inscrire ce qui tend à disparaître. Je me retrouve dans cette formule de B. Chervet. Mon utilisation de la barre verticale comme délimitation de la phrase dans Algérie, comme scansion rythmique, j’avais commencé à la formaliser (poinçon 47) : la barre ponctue, hache, coupe les essors lyriques, rappelle le S barré de Lacan, mais je la garde comme une coupe musicale délimitant des mesures mélodiques, autonomes et interdépendantes, traces musicales de dépôts. Elle me sert à évoquer le mi-dit de la guerre (mi-dit car inconnue de moi, silencieuse sinon les traces qui m’ont traversé cinquante ans). Couper les essors lyriques : oui, mais aussi, ou surtout, brider l’émotion. La barre serait alors une contre-contrainte, l’empêchement de l’empêchement, devant la force de percussion de ce que je revois. Surgit un souvenir d’enfance : mon père projetait des films super 8, et contenait mal son émotion en revoyant ses parents morts s’animer sur l’écran. J’ai laissé à Toulouse le projecteur et ses fantômes animés ; je m’occupe des photographies, c’est déjà bien assez pour l’heure. S’abîmer.

291. Visite sur les réseaux. Découvrir ce que font les autres. Sorties de livre (Françoise Renaud, Nathalie Holt), journaux de bord (Emmanuelle Cordoliani, sur le site café Europa), expos… Tisser des liens.

292. En dérive, hâtif : lire tout à fait autre chose que des livres sur le thème de A.

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